jeudi 10 mai 2012

Lettre au Président de la République Française nouvellement élu

Monsieur le Président de la République,

Votre élection suscite en France et à l'étranger de nouveaux espoirs et je suis convaincu que vous ne les décevrez pas. Le premier défi - celui-là même que vous placez en tête de vos préoccupations - est l'avenir de l'Union européenne. C'est là une occasion pour la France d'affirmer - lorsque le vaisseau tangue , bousculé par les marchés - une ambition pour l'Europe ainsi que l'ont fait Robert Schuman et Jean Monnet. 

Comme vous l'avez souligné, la France n'est pas n'importe quel pays: elle porte des valeurs qui ont essaimé partout dans le monde. Ce n'est d'ailleurs pas pour rien que l'idéogramme chinois représentant la France signifie "pays des Droits ".

Votre mission est à la fois redoutable et exaltante : quel plus beau défi pour un Président que de donner enfin du sens , un dessein et aussi un destin à l'Europe? Je ne sais si vous êtes vous même un ferme partisan d'une Europe fédérale . Ce serait peut-être anticiper quelque peu le sens de l'Histoire. Mais, Monsieur le Président de la République, vous êtes vous même l'Histoire et il vous appartient - si telle est votre mission - de l'écrire. 

Au-delà des moyens pour relancer la croissance en Europe, c'est des moyens pour relancer les institutions communautaires dont il s'agit. Entendre s'exprimer la voix de l'Europe comme jadis s'exprimait à Londres la "voix de la France" tel est l'enjeu. Car nos compatriotes ne perçoivent qu'une vision technocratique de l'Union alors même qu'elle possède (ou devrait posséder) un poids politique et économique en relation avec sa population,son marché intérieur ,son passé et aussi son avenir à écrire.

 Sans qu'il s'agisse de revenir au siècle des Lumières,nombreux sont ceux qui souhaitent que vous contribuiez à braquer les projecteurs sur l'Union...à condition qu'elle se fasse entendre et qu'elle se dote enfin des moyens rendant possible une politique de croissance alors même que les peuples désespèrent car personne ne leur parle d'espoir.

 Il serait prétentieux de ma part de préciser quels sont les moyens qui sont indispensables: la coordination des politiques économiques et financières est en tout cas une nécessité. Tout autant que les mesures structurelles à mettre en œuvre conjointement avec les autres États- Membres.

Je sais que c'est là une voie vers l'intégration. Mais n'est-ce pas là le vrai destin de l'Union que d'unifier le destin des États-Membres? Peut-être certains vous diront-ils que ce n'est pas encore le moment, qu'il y a d'autres chats à fouetter, que nous avons à prendre une décision concernant la Grèce que nous ne pourrons continuer à soutenir que si elle accepte, elle même, de faire une partie du chemin. Je sais que vous avez des dossiers à gérer qui relèvent du court terme mais il y faut un horizon.

Si vous mettez en avant fermement et clairement un dessein et un destin pour l'Europe, les français adhéreront, j'en suis convaincu. Nos valeurs républicaines auraient-elles moins de valeur si elles étaient tout autant portées et relayées par l'Europe? Je ne le pense pas: face à ceux qui se consolent en imaginant des replis hexagonaux identitaires et frileux , le message que vous êtes à même de porter haut et fort dans l'Union en sera d'autant démultiplié.

Vous renouvelant ma confiance, je vous prie de croire, Monsieur le Président de la République, en l'assurance de ma très haute considération.

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