dimanche 25 mars 2012

Iran : mensonges et vérités


 Je recommande à ceux qui veulent avoir une vision exhaustive le livre de Bahman Nirumand : Iran, vers le désastre? (paru en 2007 chez "Actes Sud").

 L'auteur a été un opposant au shah d'Iran mais a dû quitter son pays en 1982, contraint et forcé, trois ans  après la révolution islamique. C'est un livre intelligent, a priori impartial et bien documenté .

 En ce moment de doutes quant au risque réel du nucléaire iranien , c'est un livre qui donne une version intéressante de la situation. En résumé :  le régime des mollahs a voulu , effectivement, se réserver la "carte " du nucléaire militaire. Mais (selon l'auteur) les États- Unis de George Bush auraient - en fonction d'intérêts stratégiques - forcé le trait et entrainé l'Union européenne un peu vite sous la bannière de la lutte contre un potentiel terrorisme d’État.

 M Nirumand ne nie pas les contacts de l'Iran (1987) avec le "pyromane" du Pakistan (Abdul Qadeer Khan) mais il estime que Téhéran n'a jamais envisagé d'utiliser l'arme nucléaire. Le nucléaire serait devenu ( tous volets confondus) un symbole, un élément de fierté nationale. Il pointe sur les ouvertures et le souhait de dédramatisation du Président Khatami par opposition avec la gesticulation provocatrice du Président Ahmadinejad. 

Cette version est intéressante et- apparemment- objective. La démonstration, très documentée notamment sur la position européenne, se heurte cependant ( à mon sens) au moins à 4 considérations:

a) en dépit des gages donnés en 2003/2004 par le Président Khatami, le programme nucléaire (avec une probable option militaire ) s'est bel et bien poursuivi (Natanz, Arak, Ispahan etc...). Il y a donc là une évidente limite à "l'ouverture" faite par un "modéré".

b) le contentieux Eurodif a été ponctué d'attentats et de prises d'otages. La violence est donc sous-jacente : il serait donc imprudent d'être trop confiant .

c) au-delà des Présidents , c'est le "Guide Suprême"  ( l' Ayatollah Khamenei) qui décide et qui a donc cautionné un programme nucléaire avec ses deux volets en dépit des fatwas assurant que le nucléaire militaire était incompatible avec le Coran.

d) Aucune explication n'est donnée quant  au niveau d'enrichissement (au-delà de l'UFE à 3,5 %)

Cela dit, le syndrome "va-t-en-guerre" des néoconservateurs américains de la précédente administration interpelle. En particulier (si cela est exact) le parti de "grossir" les rapports de l'AIEA.

Même si le point de vue de l'auteur ne peut être partagé dans son entier, ce livre me semble un document de référence tant il exprime avec force et talent  le ressenti d'un iranien qui s'essaye à décrypter une situation complexe.



Aucun commentaire: