samedi 18 août 2012

Iran/Israël : scenarii d'une guerre (trop) annoncée

Les " bruits de botte" continuent sur internet et les déclarations restent toujours contradictoires:bluff ou pas bluff? En tout état de cause c'est au moins une guerre verbale : déclarations du Premier ministre israélien et provocations du Président Ahmadinejad.

 J'imagine (en souhaitant que tout cela reste virtuel) quelques scenarii qui, hélas, sont tous catastrophiques pour la paix dans le monde. C'est donc un appel à la raison dans le prolongement du "processus d'Istanbul".

1- une offensive israélienne seule :

. Israël ne possède pas d'avions en nombre suffisant pour atteindre et neutraliser à la fois la vingtaine de sites nucléaires sensibles iraniens (sites d'enrichissement de l'U, réacteur à eau lourde, unités de transformation du yellow cake en gaz UF6 etc...).

En excluant une frappe sur la centrale nucléaire de Busher (sur le détroit d'Ormuz) qui provoquerait un nuage radioactif se propageant bien au-delà de l'Iran, on peut imaginer -si une attaque ciblée est envisagée - que la frappe israélienne pourrait être (par exemple) limitée au site de Fordo. C'est un lieu emblématique tant par le nombre de centrifugeuses en partie transférées de Natanz, le degré d'enrichissement de l'uranium que par sa localisation singulière sous un massif rocheux . Sa proximité avec la ville de Qom , lieu saint majeur pour les musulmans chiites, rend tout de même délicate cette opération.

 Cette frappe (qui supposerait l'utilisation de missiles "anti-bunker") ou une frappe équivalente ailleurs pourrait susciter 3 types de réactions :

a) du Hezbollah depuis le Liban. Israël serait directement visé par des roquettes et des missiles de courte portée (cela vient d'être affirmé sans nuance aucune par le Hezbollah ).

b) blocage par Téhéran du détroit d'Ormuz par où transite 30 % du pétrole "mondial"

c) usage par l'Iran de ses missiles sahab-3 dont la portée est de l'ordre de 2000km 

A noter que le blocage du détroit d'Ormuz (eaux internationales) aurait pour effet -cela a déjà été dit par Washington début 2012 - de déclencher l'intervention des États-Unis depuis ses bases navales et aériennes  proches (Ve flotte à Barheïn )

2- une offensive conjointe Israël /États-Unis:

. C'est apparemment ce que souhaite Israël (du moins plusieurs hauts responsables politiques et aussi l'opinion publique israélienne).

.Dans cette hypothèse, l'attaque aérienne (qui suppose résolu le problème du couloir aérien) pourrait concerner bien plus que le site de Fordo: plusieurs sites de la filière nucléaire seraient probablement atteints (sauf évidemment la centrale nucléaire de Busher pour les raisons déjà évoquées et les restrictions découlant du TNP cf. point 3 ci-dessous).

. Les représailles iraniennes iraient, probablement , au-delà de la seule intervention du Hezbollah depuis le Liban.

.La Russie ne resterait certainement pas les "bras croisés". Sa position sera déterminante comme celle de la Chine.

.Au-delà des rivalités sunnites/chiites,le risque existe d'une "union sacrée" d’États islamiques tant du Maghreb que du Machrek (cf. les contacts Iran/Égypte/Tunisie...).

.Cette issue comporte un risque d'embrasement du Moyen-Orient et reste largement ouverte sur l'inconnu. A noter que le scénario 1-b) conduit au scénario 2 (avec ses conséquences).

                                                                         ***

Je ne puis que souhaiter que ces 2 hypothèses restent lettres mortes , l'Iran acceptant les propositions des 5+1 et se rappelant les propos de l’imam Khomeiny (en 1979) déclarant que le nucléaire militaire était incompatible avec le Coran.

Comment , par ailleurs, ne pas regretter que le projet d'une Zone Exempte d'Armes Nucléaires (ZEAN) au Moyen-Orient (tel que formulé à la Conférence de 2010 sur le TNP ) n'ait pas avancé d'un pouce? Une conférence des principaux acteurs était pourtant prévue en 2012...avant le "printemps arabe".

3- compatibilité d'une "frappe préventive" avec le Traité de non-prolifération nucléaire: 

Une neutralisation d'un site nucléaire ne devrait évidemment s'accompagner d'aucune ambigüité sur le caractère militaire des installations. Dans le cas contraire, le (ou les) pays prenant cette initiative seraient en contradiction avec le TNP (ou du moins avec le document final adopté le 28 Mai 2010 lors de la Conférence de New-York sur le fonctionnement du TNP ).

 Le point 75 du Document final intitulé : "Attaques armées visant des installations utilisant l'énergie nucléaire à des fins pacifiques "  précise:

 "La Conférence estime que les attaques ou menaces contre des installations utilisant l'énergie nucléaire à des fins pacifiques compromettent la sûreté nucléaire,ont des conséquences dangereuses sur le plan politique, économique et écologique, et amènent à s'interroger sérieusement sur l'application du droit international concernant l'usage de la force en pareil cas, ce qui pourrait justifier le recours aux mesures qu'autorise la Charte des Nations Unies ". 

 Certes, Israël n'ayant pas signé le TNP n'est pas "tenu" par ces dispositions. Il n'en va pas de même pour les États-Unis. D'où la nécessité (il me semble) de ne pas tenir un double langage : d'une part un avis pour le moins fluctuant et officiellement incertain sur l'option militaire du nucléaire iranien, d'autre part des informations recoupant apparemment celles d'Israël sur la "ligne rouge" que franchirait désormais Téhéran dans le cadre d'un programme portant sur les ogives des missiles balistiques, amorces et détonateurs...




Aucun commentaire: