samedi 9 mai 2020

Moyen-Orient / USA : Nouvelle donne ?




La stratégie américaine est - on le savait - brouillonne et l'on ignore (en dehors des tweets de Donald Trump ) s'il y a un cap . Le positionnement de Barack Obama avait , lui , le mérite de la clarté : la stratégie dite du "pivot" démontrait que les Etats-Unis envisageaient de privilégier leur défense et leur présence en Asie , notamment en mer de Chine afin de contenir l'avancée (cf. la stratégie dite du "collier de perles ) de Pékin . 

Donald Trump avait , semble -t-il , nuancé cette position (cf . refus de signer le traite TPP) et s'inscrivait dans une diplomatie de soutien à l'Arabie Saoudite qui devenait ainsi le "fer de lance "contre l'Iran (et donc le soutien d’Israël ) . Le soutien explicite à Riyad était certes une déclinaison du Pacte du Quincy (1945/ fourniture de pétrole contre protection ) mais aussi une carte maîtresse pour l'acceptation par les pays arabes du plan de paix Israël / Palestine  préparé par les Etats-Unis . 

Or voici (1) que les Etats-Unis viennent de retirer des batteries anti-missiles qui protégeaient les champs pétroliers saoudiens contre d'éventuelles attaques iraniennes . On peut se poser ainsi la question : le retrait de ces batteries est-il une réponse "du berger à la bergère" après que l'Arabie Saoudite ait mené son propre jeu pétrolier (augmentation massive de sa production de pétrole pour accroître ses parts de marché face à la Russie...mais aussi avec pour effet de mettre en faillite les sociétés américaines exploitant les gisements de pétrole de schiste ) ? Ou bien la vue de Donald Trump est-elle à moins courte vue et va-t-elle renouer avec la stratégie d'Obama tendant à délaisser le Moyen-Orient pour aller "contenir " la Chine ...en abandonnant l'Arabie Saoudite et en passant par pertes et profits son duo et ses envolées avec le prince héritier Mohamed Ben Salman ?

Parions cependant que les pétroliers américains , forts de leurs lobbies politiques , ne se désengageront de si tôt du Moyen-Orient tant est nécessaire pour les USA de maintenir un courant d'importation de pétrole à bas prix au moment où la rentabilité du  gaz et le pétrole de schiste est renvoyée ...aux calendes grecques .

_____________

(1) cf. Le Point en ligne du 8 Mai 2020 (LePoint. fr )

mardi 5 mai 2020

Inflation et vérité des prix : constats et bon sens



Alors que l'inflation est en forte baisse (ce que regrettent certains investisseurs ) la réalité des prix - me répète ma voisine - ne correspond pas à l'indice réel . Certes le taux d'inflation (indice des prix à la consommation ) calculé en mars dernier est de l'ordre de 0,4 % (1) mais les prix réels ont , dans les grandes surfaces , augmenté dans de bien plus grandes proportions . 

Ainsi ma voisine Odette a constaté que dans une enseigne bien connue le prix moyen du "panier de la ménagère " est , en avril , de l'ordre de 140 voire 150 euros soit une augmentation de plus de 20 % par rapport à décembre dernier . Ma voisine dont la pension est de 900 euros n'arrive pas , me dit-elle , à joindre les deux bouts . Et peu lui chaut la diminution du prix de l'essence car Odette , 83 ans, ne sort pas ...d'autant plus en ce moment où elle se trouve confinée dans son 2 pièces . Elle rajoute - et elle en veut au gouvernement - qu'il est anormal que l'Etat ne prenne pas en charge le coût des masques de protection (dont , après de nombreuses tergiversations , Matignon et l'Elysée considèrent désormais qu'ils sont bien utiles ) . Odette s'est, certes, confectionné quelques masques "maison" mais elle n'est pas certaine du résultat bricolé sur sa vieille machine à coudre Singer .

Dans le même temps - mais est-ce deux mondes différents ? - des chefs d'entreprise et la Banque Centrale Européenne souhaitent atteindre une inflation de 2 % afin d'inciter aux investissements en les rentabilisant . Odette n'a forcément pas en tête que la "planche à billets " de la BCE peut générer de l'inflation mais , avec son jugement bien à propos , elle me dit qu'elle n'est pas d'accord : si beaucoup réduisent leur consommation , me dit-elle, les prix baisseront car les producteurs se heurteront au mur que ne peuvent franchir les personnes âgées avec des pensions de 800 ou 900 euros ainsi que la cohorte des chômeurs laissés au bord de la route  pour solde de tout  compte . Ma voisine a raison ...

___________

(1) L'inflation mesurée en Mars 2020 est - sur 1 an - de 0,7 % 

samedi 2 mai 2020

Pétrole : quel impact géopolitique de la baisse des cours ?



Quand bien même le prix du pétrole a progressé du fait de l'accord intervenu au sein de l'OPEP et finalement appliqué début Mai , la baisse prévisible de la demande mondiale (et du niveau des stocks) ne permettra pas de revoir de si tôt un baril à 50 $ .  Or le pétrole de schiste américain , par exemple , n'est rentable qu'à partir de 40 $ . 

Quel impact (théorique) prévisible à court/moyen-terme sur les relations internationales ?

1- les Etats-Unis ont tout intérêt à ne pas hâter leur désengagement du Moyen-Orient (quand bien même la tentation sera évidente de renforcer leur position en Asie pour contenir la Chine ) afin de ne pas risquer de tarir un approvisionnement moins onéreux (coût d'extraction Arabie Saoudite : 3 $ ) . Tout aussi essentielle deviendra la nécessité de maintenir des alternatives d'importation depuis l'Amérique latine (cf. coût d'extraction du pétrole vénézuélien : 14 $) .

2- Les pays producteurs du Moyen-Orient devront compter sur les importations chinoises (et indiennes) dans un contexte économique de récession occidentale entraînant une forte réduction de la demande . La Chine et l'Inde en profiteront probablement pour renforcer leur position au Moyen-Orient  . Ces pays se trouveront ainsi "nez-à-nez" avec les Etats-Unis . L'autre hypothèse est un approvisionnement plus important auprès de la Russie , situation qui renforcerait les liens de dépendance entre Moscou et Pékin . Cette situation sera d'autant plus éprouvante pour la Russie que ses ressources sont liées  au cours du pétrole  ( projet de budget bâti sur une hypothèse de 45 $ ) .

3 - L'Afrique sera touchée de plein fouet par la baisse des cours et de fortes tensions pourraient en résulter (Nigeria , Angola , Algérie ...Libye , Soudan ) . La dépendance de pays d'Afrique sub-saharienne à l'égard de la Chine (endettement) en sera d'autant plus évidente et ces pays d'autant plus fragilisés . D'où les récents appels en faveur d'une annulation ou diminution de la dette des pays les plus touchés . La Chine se sentira-t-elle concernée ?

4- L'Europe (U.E.) , largement dépendante de ses importations de pétrole, tirera évidemment parti de la baisse des cours . Ce pourrait être un élément propice au rebond ...si tant est que la production et les investissements productifs repartent . Encore faudrait-il que la demande soit à la hauteur . Pour autant les incidences de la baisse du cours du pétrole sur la politique étrangère de l'Union (ou plutôt sur les relations bilatérales de chacun des Etats) n'est pas , actuellement , mesurable . Un impact possible sur les relations avec la Chine et la Russie ? C'est une éventualité . 

mardi 28 avril 2020

Venezuela : sur qui (et sur quoi) compter ?



Le Venezuela est dans une situation critique comme d'autres pays en Amérique du Sud . Mais le manque de visibilité n'affecte pas simplement l'économie mais aussi la politique et la conduite de la nation .

1- En politique on ne sait plus qui fait quoi : Juan Guaido , Président autoproclamé et Président de l'Assemblée nationale n'a pu , face au Président Nicolas Maduro , asseoir son autorité en dépit du soutien des Etats-Unis . Pourtant , en septembre 2019 , Guaido avait mis en place un système (réintégration du Venezuela dans le TIAR)  qui aurait pu servir de relais à une "intervention " plus ou moins directe de l'OEA (c-a-d des USA) . Mais l'Amérique latine n'est plus une "colonie " américaine comme au temps de l'intervention des Etats-Unis au Guatemala en 1954 : contrairement au positionnement de  John Foster Dulles à l'époque , Mike Pompeo vient de prendre acte du "surplace" de Guaido en appelant à son discret retrait en attendant de prochaines élections et la constitution d'un "Conseil d'Etat " intérimaire issu des 2 camps .

2- La situation économique est pire que la situation politique : une inflation de 9000 % et un budget aux ressources qui s'évaporent au rythme de l'effondrement du cours du baril : le baril venezuelien vient de passer sous la barre des 10 dollars alors que le coût d'extraction est de 19 $ . Or le budget dépend à 70/80 % des exportations de pétrole . Les files d'attente s'allongent devant les magasins et les hôpitaux qui doivent faire face à la pandémie .

                                                                       
Finalement les vénézuéliens vivent une triple crise : sanitaire (confinement) , économique (magasins vides,arrêt de l'appareil de production ) et politique (le "pion" Guaido soutenu par les Etats-Unis n'a pas progressé sur l'échiquier ...et les Etats-Unis semblent maintenant sortir du jeu ) . Il demeure cependant 1 inconnue : qui va "mettre la main" sur les réserves de pétrole (les premières du monde) du Vénézuela ? Les Etats-Unis qui ne peuvent plus compter sur le pétrole de schiste ...ou bien la Chine (1) qui avance sur le continent latino-américain ? ...ou bien un nouveau Bolivar vénézuélien ? 

_______________

(1) pied-de- nez aux Etats-Unis : le prix du baril du pétrole n'est officiellement pas exprimé en dollars mais en yuan ...

jeudi 23 avril 2020

Moyen-Orient / tensions : bal masqué ?



La situation sanitaire semblait mettre sous cloche les risques de conflit au Moyen-Orient . D'ailleurs on a vu des solidarités nouvelles émerger entre les Etats du Golfe et l'Iran dans un contexte particulièrement dramatique pour Téhéran . Mais , sans être un rideau de fumée , la crise sanitaire ne masque pas les tensions : la solution "mi-figue mi-raisin " trouvée en Israël (gouvernement de coalition ) laisse la porte ouverte à une annexion de territoires en Cisjordanie , sur le Golan et la rive gauche du Jourdain alors même que le "plan de paix" proposé par Donald Trump semble , pour l'instant , encore à l'eau .

De son côté l'Iran vient de mettre en orbite un satellite militaire montrant ainsi qu'il dispose de missiles balistiques susceptibles (1) d'être équipés d'une tête nucléaire . Dans le même temps les Etats-Unis redoutent (ou font mine de redouter) un harcèlement naval dans le Golfe . 

Ces tensions interviennent - c'est à noter - à un moment où l'on ne craint plus une flambée des cours du pétrole du fait des baisses engendrées par la diminution drastique de la demande mondiale . Cette situation , sans être pour autant explosive , permet toutes les hypothèses alors que le monde est aux prises avec une des situations sanitaires les plus sérieuses de ces cent dernières années .

Une interrogation dans ce contexte : à qui profitent les tensions actuelles ? Aux Etats-Unis afin de pouvoir lancer une bouée de sauvetage aux sociétés américaines exploitant le pétrole de schiste et qui sont au bord de l'asphyxie ? Ou bien , au contraire , et au-delà des enjeux économiques , à des Etats qui voudraient saisir l'opportunité d'une situation internationale au bord du collapsus  pour régler des comptes qui ne seraient pas exclusivement financiers ?

________________

(1) les américains soutiennent que ces missiles balistiques sont contraires à une résolution ONU interdisant , peu après l'accord du 14 juillet 2015 , des vecteurs pouvant être équipés de tête nucléaire . Ce à quoi répond l'Iran que ces missiles (dont le rayon d'action est cependant d'environ 2000 km ) n'ont pour fonction que d'être strictement défensifs .

mardi 21 avril 2020

Interrogations d'un Béotien face à la cacophonie ambiante



L'épidémie était imprévisible et donc non anticipée . D'où le concert de "couacs" difficilement acceptables pour un Béotien qui s'en remet aux "sachants" qui , forcément , disent la vérité (... ) . Il n'empêche que ces "couacs" , dans notre civilisation si avancée croyait-on , sont nombreux : Sortir masqué ? certains doutent encore de l'efficacité des masques dont on nous a longtemps dit qu'ils n'avaient guère d'utilité ; or c'est désormais le contraire  . Confinement ? Faut-il  remercier l'Etat de prendre à ce point soin de nous ou bien s'interroger : le confinement est-il ou non compatible avec l'immunisation de groupe ? (les 70% de contamination  dont on nous rabat les oreilles) . 

Zone d'ombre sur les origines de la pandémie : un virus qui aurait échappé du laboratoire P4 de Wuhan ou bien hôte indésirable d'un marché aux pangolins , chauve-souris  et autres sympathiques bestioles  ? Volonté de la Chine de coopérer ou bien eau opportunément apportée au moulin des Routes de la Soie ?

L'Immunisation est-elle définitive ou bien simplement momentanée ? Ne serait-elle qu'une " anti-chambre " avant l'arrivée d'une "nouvelle vague " (que redoutent , encore plus intense, les américains lors de l'hiver prochain ) . De la même manière , les Etats-Unis admettent que 2 décès ont eu lieu en Californie début Février à la suite de contacts avec la communauté locale chinoise  : le virus aurait donc touché les Etats-Unis dès décembre . Ainsi contrairement à ce que prétendait Donald Trump en mars ce n'est pas l'Europe qui transmettait le " virus chinois " : ce virus guerrier venait du Pacifique !

Cacophonie des "sachants " à laquelle se surajoutent les onomatopées encore calibrées d'un monde politique pour l'instant en  réanimation ...

vendredi 17 avril 2020

Coronavirus et laboratoire de Wuhan : théorie complotiste ?



Est-ce une théorie complotiste que de prétendre que le coronavirus serait issu - par accident- d'un laboratoire de Wuhan et non du marché aux poissons dont on a longuement parlé ? Le Professeur Luc Montagnier , prix Nobel de médecine 2008 (découverte du virus du sida) vient d'affirmer (1) qu'après étude du virus il avait acquis la certitude que ce virus avait échappé à un laboratoire qui tentait d'en faire un vaccin .

Cette affirmation relance un questionnement qui passait pour un non-sens d'esprits échauffés fantasmant au gré de Fake news  . Cela d'autant que le laboratoire P 4 de Wuhan a été réalisé en collaboration avec la France (Inserm) avant d'être inauguré en 2017 .Dans le même temps la Grande-Bretagne , les Etats-Unis , la France font  part de doutes . Le Président Macron évoque des "zones d'ombre " dans l'attitude de la Chine . On sait qu'elle a lancé l'alerte avec retard et aussi neutralisé des "lanceurs d'alerte ".

Gardons-nous cependant de prendre pour argent comptant les déclarations du professeur Montagnier souvent décrié depuis sa sortie sur la "mémoire de l'eau " et l'inefficacité des vaccins . Pourtant ces affirmations de l'ancien Nobel et éminent virologue  ne peuvent être passées sous silence quand bien même elles semblent sortir d'un roman de science-fiction ...si le contexte , avec son terrible cortège de morts , n'était pas devenu bien réel .

Qui dit vrai ? pourra-t-on éclairer les "zones d'ombre" , si elles existent , de l'Empire du Milieu ? ...ou bien n'est-ce là que tentative de manipulation ou de diversion ? Bien malin qui , en ce moment , possède la réponse .


___________

(1) valeursactuelles. com  + chaine TV Cnews du 17 avril

mercredi 15 avril 2020

Relance de l'investissement : pas si facile !



Le ministre de l'économie , interrogé par la Commission des finances de l'Assemblée nationale, a regretté que les français épargnent plutôt que d'investir : la collecte du "Livret A " aurait ainsi doublé entre février et mars atteignant , pour ce dernier mois , la somme d'environ 4 milliards d'euros . Bruno Le Maire déplore que nos concitoyens , comme autant d'écureuils, constituent (et privilégient) une épargne de précaution . 

A juste titre et prenant en compte des considérations économiques le ministre souhaite que la relance puisse se faire via l'investissement . Mais peut-être se méprend-il sur 2 considérations :

1- D'abord les français (ou nombre d'entre eux) ont pour priorité de se protéger au rythme des statistiques "pandémiques" que Jérôme Jacob égrène tous les soirs comme on sonne le glas et qui , de ce fait , ne sont guère euphorisantes  : dans ce contexte d'incertitude à la fois économique, financière et sanitaire nos concitoyens tentent de se constituer une épargne de précaution pour eux-mêmes et leur famille . Faut-il le leur reprocher ? 

2 - Ensuite  - et sans être un oiseau de mauvaise augure - on peut se demander si la relance économique va dépendre d'une augmentation de l'offre . En effet le taux d'utilisation des capacités de production dans l'industrie manufacturière plafonne en mars à 58 % (1) contre 82 % en mars 2019 . Avant même le confinement , en février 2020 , ce taux n'était que de 79 % . C'est dire qu'il existe encore des capacités inemployées et de nature à faire face à un accroissement de la demande en fin de période de confinement . 

Quoi qu'il en soit il est à souhaiter que le plan de relance gouvernemental porte ses fruits et que , dans un deuxième temps , une fois atteinte la barre haute du taux d'utilisation des capacités de production , les projets d'investissements se concrétisent sans trop attendre et ne soient pas différés du fait d'un trop grand recours aux importations . Question de confiance ? 

__________

(1) statistiques Banque de France (webstat.banque-france.fr)

mardi 14 avril 2020

Le retour de l'Etat-nation




C'est peut-être ce que l'on retiendra , plus tard , de la crise sanitaire de l'année 2020 : ce sont les Etats qui ont été en première ligne et non pas les structures  régionales (Union Européenne, Unasur , O.C.S ou Union Africaine ...) ou mondiale (ONU, OMS ...) . Dans l'urgence et l'angoisse qui l'accompagne c'est la "première ligne " d'efficience , de solidarité et d'information qui compte (Chef d'Etat ou de gouvernement , préfets ou gouverneurs , Présidents de Régions ou Présidents de territoires autonomes etc...) . Ce sont eux les avants-centre et les demi de mêlées . 

L'Union Européenne a tenu lieu de "trois-quart aile "ou de "back office" dont le visage n'est pas apparu à défaut d'incarnation convaincante (ni Charles Michel , ni Ursula von der Leyen , ni Christine Lagarde) . Dans des situations de crise ce sont les Etats qui sont en première ligne parce que les citoyens ont besoin d'un chef de file et non pas d'une machine avec ses rouages si bien huilés soient-ils .

Une leçon à tirer , le moment venu , sera la nécessité pour l'Union de se doter d'un visage : peut-être faudra-t-il se décider en faveur d'un interlocuteur unique (comme cela avait été un moment esquissé dans les couloirs de Lisbonne en 2007) à la fois Président du Conseil européen et Président de la Commission .

Evidemment il ne s'agit pas de critiquer le rôle de l'Union quand bien même il y a eu "retard à l'allumage " : son action en termes économiques et financiers est essentielle . Mais sa dimension politique demeure dans l'ombre . En attendant ce sont les Etats-Nations qui sont en scène ... pour le bien ...ou le mal ? 

lundi 6 avril 2020

Croissance zéro = zéro emploi



Bruno Le Maire fait une piqûre de rappel : la croissance du PIB mondial va se trouver en berne de plus de 3 % . Celle de la France sera négative avec une chute de 6 à 8 % . Allons-nous nous installer dans un scénario de croissance 0 comme le souhaitait jadis le Club de Rome dans les années 70 (1) ?

Ce scénario était , à l'époque , une assurance contre les "méfaits" d'une croissance à +7 ou + 8 % et le pillage des ressources naturelles constaté à l'époque allant de pair avec les pollutions et les accidents industriels  . Ce scénario est-il réellement viable aujourd'hui ?

1- Un objectif de décroissance ou d'une croissance nulle est incompatible avec l'émergence d'Etats (Afrique, Amérique du Sud ...) vivant de leurs ressources naturelles . Dans les pays "industrialisés" ce scénario se traduirait par une brusque montée du chômage : les capacités d'investissement n'auraient pas à être augmentées puisque en adéquation avec une demande faible si tel était notre souhait de vivre , désormais, de manière plus "économe" et d'alléger notre consommation .

2 -Dans le même temps les rêves du Club de Rome sont , désormais , à notre portée puisque nous vivons une remise en cause globale de notre modèle économique . C'est , pour certains , une opportunité . Cependant il faut se demander si cette croissance zéro (après une décélération abrupte) est réellement ce que nous voulons . Ou bien , à défaut de croissance , voulons-nous miser sur un revenu universel... d'inactivité comme seule alternative au désemploi et à l'absence de revenus ? Ce n'est pas en tout cas l'option qui prévaut dans la zone euro ...

___________

(1) cf. rapport Meadows , The limits of growth (1972, M.I.T.)

dimanche 5 avril 2020

America ...First ?



Les Etats-Unis vivent une crise sanitaire sans précédent et en sortiront probablement affaiblis . Le fonctionnement de leur système de santé donnera lieu à des interrogations et à des remises en cause (cf. les millions de personnes ne bénéficiant pas de la gratuité des soins) . Leur marge de manœuvre sur le plan international sera réduite du fait d'une perte de crédibilité . Il est également prévisible que d'ici 1 à 2 ans les Etats-Unis , fort heureusement, remontent la pente sur le plan économique mais cette dimension ne concerne qu'une partie du prisme et , par ailleurs , la tentation hégémonique sera freinée par la nécessité de suturer les blessures sociales internes .

La Chine tentera certainement de saisir cette occasion pour se frayer un chemin en direction de l'Occident et d'asseoir ses positions en Afrique voire en Amérique du Sud conformément à son "agenda 2049 " . L'avancée Chinoise en Afrique sera d'autant plus importante que ce continent risque d'être profondément déstabilisé par la crise sanitaire : certains Etats n'auront d'autre recours que d'appeler Pékin à l'aide . Ce n'est bien sûr qu'une hypothèse mais elle est vraisemblable s'agissant de certains Etats à la dérive ...et disposant aussi de ressources naturelles dont la Chine est friande . 

Dans ce contexte où les fractures vont s’exacerber et  où le leadership américain sera contesté il reste à l'Union européenne un champ libre pour tenter de "jeter un pont " par dessus la faille . L'Europe - il faut en convenir - n'a pas été à la hauteur pour gérer la crise actuelle . Il n'y a pas lieu d'ailleurs de jeter la pierre aux Etats-Unis puisque en Europe ni la Commission ni le Conseil n'ont su prendre les devants ou réagir à temps . Mais face à ce défi et en prenant acte de ses carences l'Union peut rebondir d'autant plus que la Russie , également ébranlée , ne pourra longtemps faire "cavalier seul " ou s'atteler durablement à la Chine au  risque de se trouver vassalisée . L'Union européenne pourra d'autant mieux rebondir qu'elle retrouvera dans cette prise de conscience une part du message d'équilibre du Siècle des Lumières ...et un espace pour exister au plan international .

jeudi 2 avril 2020

Deconfinement : appeler "un chat un chat "



La tache sera lourde ce soir pour Edouard Philippe , Premier ministre : il devra préciser ce qu'il attend du deconfinement car les experts ne tiennent pas le même langage . 

Pour certains , le deconfinement a pour seul effet de ralentir la propagation de la contamination : ralentir simplement car la vague virale devra balayer la France d'est en ouest et du nord au sud . En fait, il s'agit de "moduler" la charge de l'adversaire viral en fonction des capacités hospitalières . Pour d'autres le confinement n'a pas pour seul effet de ralentir la vague mais de se doter , pendant ce temps , des armes pour mieux la combattre .

Il y a , de fait, deux écoles : celle qui considère que le corona virus ne sera vaincu que lorsque 60 % de la population sera contaminée (et donc immunisée) et ceux qui estiment que ce scénario fataliste ne s'accorde pas avec la manière dont la Chine , le Japon , la Corée du Sud , Singapour ou Taïwan ont géré la situation .


A défaut de clarifier ces points (qui ont un impact sur la stratégie territoriale de deconfinement ) nos concitoyens ne comprendront pas (1) ce que préconisent le gouvernement et les scientifiques  : faut-il souhaiter - se demandent-ils - ne pas être contaminé ou bien au contraire espérer être contaminé afin d'être immunisé ?   Un peu de lumière serait bienvenue !

____________

(1) Un autre point non compris : le ministre de la santé (et le reste du gouvernement) indique que le port de masque est inutile pour la population (hors professionnels de santé). L'académie de médecine dit le contraire . Est-ce que le port du masque ne serait pas considéré comme inutile...du fait, tout simplement , de l'absence de stock ?

mercredi 1 avril 2020

Modèle libéral : du plomb dans l'aile



La crise sanitaire nous fait redescendre sur terre et remet en cause dogmes et croyances . Le modèle libéral n'est plus la panacée et il faudra probablement en construire un autre sans tomber dans les excès des totalitarismes de droite ou de gauche . 

La réponse des Etats-Unis à l'urgence actuelle a privilégié l'économie à coups de plans de relance qui ont , peut-être, "sauvé les meubles " mais pas la vie de citoyens américains dont l'accès aux soins est limité au moins pour 30 millions d'entre eux ne bénéficiant pas d'une prise en charge . Il semble que Donald Trump ait changé son fusil d'épaule concernant les réponses à apporter à l'épidémie : comme pour Boris Johnson la doctrine de "l'immunité de groupe " n'est plus la référence car les structures hospitalières ne peuvent pas absorber les patients sacrifiés sur l'autel de l'immunisation . A souhaiter que le nouveau virage ne fasse pas , dans ces deux pays , trop de victimes .

L'économie et la politique encadrées et mises sous tutelle comme en Chine ne sont pas non plus la solution en dépit de la réactivité que permet le musellement des opinions . La Route de la Soie est probablement l'horizon de la Chine mais il n'est pas sûr qu'elle figure telle quelle sur notre GPS . 

 Le champ est donc libre pour que l'Europe propose un modèle d'équilibre : ni Marx ni Friedman . Il faudra du temps . L'Union européenne devra tirer les leçons de son silence et de ses arrogantes leçons (cf. Pays-Bas + Allemagne) et proposer un modèle de société qui aille au-delà du seul Mea culpa . Le Conseil européen a du pain sur la planche ...A défaut de réaction et de resserrement des rangs l'idéal européen risque d'aller à vau-l'eau ou de sombrer dans les décors .

jeudi 26 mars 2020

Social ou rentabilité ?




La crise sanitaire actuelle montre les limites du libéralisme : l'Etat est , en France , interpellé pour son manque d'anticipation du risque épidémique (cf. gestion des stocks de masques selon le principe de la "rationalisation des coûts budgétaires ") . Par ailleurs , les Etats de l'Union et les Etats-Unis interviennent massivement via des plans massifs de relance ... 

On est donc bien loin du modèle libéral dans lequel la vie économique (et sociale) s'auto-régule . Il y a peu on se réjouissait de la régulation de l'action de l'administration selon des critères du privé (1) . Désormais l'Etat admet à juste titre que les services publics n'obéissent pas aux seuls critères de rentabilité . Va-t-on vers un socialisme d'Etat ?

Ainsi s'amorce un véritable changement ...à mille lieux de ce qu'envisageaient , au départ , Boris Johnson et aussi Donald Trump qui , désormais, ne renie plus la réponse du "New Deal "  quand bien même ce serait pour satisfaire des ambitions du court terme .

___________

(1) cf . la loi dite "de transformation de la fonction publique (6 Aout 2019) 

mardi 24 mars 2020

Maisons de retraite : pensionnaires sacrifiés ?




L'accumulation des décès de pensionnaires de maisons de retraite interpelle : certes le gouvernement agit et s'inquiète mais le nombre de morts s'élève déjà à une centaine (1) et pourrait atteindre un millier d'ici quelques jours . Va-t-on assister sans broncher , dans les semaines prochaines , à une hécatombe telle celle de la canicule de 2003 (20 000 morts en France) ? 

Il est incompréhensible que tous les personnels des EPHAD ne soient pas dotés de masques de protection qui freineraient la contamination depuis l'extérieur (2) . Le temps des explications (et des règlements) n'est pas encore venu et ce n'est pas un post qui va faire naître la solution mais on peut, aussi, en quelques lignes exprimer son incompréhension  . 

Dans cette crise sanitaire où le corps médical se comporte héroïquement , où le gouvernement fait front , où le corps social fait confiance on ne peut considérer que l'hécatombe possible dans les maisons de retraite soit à ranger dans le rayon "dommages collatéraux" . Le ministre de la santé Olivier Veran qui gère avec volontarisme la situation en est , j'en suis persuadé , convaincu .

____________
 
(1) à la date du 24 mars 2020

(2) besoins estimés à 500 000 masques par jour pour environ 6500 EPHAD en France .

dimanche 22 mars 2020

Europe : ni perdre raison ni perdre pied



On nous assure qu'après la crise sanitaire nous ne verrons plus le monde comme avant : nous aurons tiré des leçons en matière de prévision , de délocalisations , de comportement politique et de gestion de crise etc.. etc ..Mais il est un domaine dans lequel il est indispensable d'aller de l'avant : l'union politique des nations européennes pour nous permettre de dépasser les égoïsmes nationaux puisque  les Etats isolés ont tant de mal à se coordonner (1) qu'ils font , pour certains, du sur-place en dépit de leur (bonne) volonté .

La crise aura démontré qu'une réponse concertée de l'Union est indispensable sur le plan médical, sur le plan économique et financier et , plus largement , sur le plan social . Cette réponse - qui n'existe vraiment que sur le plan financier - est à construire d'urgence dans les autres domaines . 

Par ailleurs , alors que l'Union tergiverse , des pions avancent sur l'échiquier mondial en profitant de nos faiblesses et de la tentation isolationniste des Etats-Unis .

Car les Etats  européens isolés et repliés  ne peuvent prétendre au "don de double vue " (!) et leur vision relève du très court terme : seule l'Union européenne peut permettre les grandes manœuvres que suppose le recadrage de la mondialisation ...et l'ambition qui va avec .

____________

(1) Tout comme les provinces ou régions tentées par la sécession (Catalogne, Flandres, Lombardie , Vénétie ...) 

samedi 21 mars 2020

L' Eglise confinée ...



Le silence va de pair avec le confinement . Mais le silence de l'Eglise , en ces moments , est étrange . L'Eglise aurait-elle perdu la foi ? Certes , les médecins et les scientifiques sont devenus les nouveaux prêtres de notre société et ce sont les  chefs d'Etat qui portent la Parole divine .

Mais il est troublant de peu entendre le pape François (1) ou bien ne peut-il se faire entendre car sa voix ne serait plus relayée au-delà d'un premier cercle ? Les chaînes de télévision semblent confiner sa parole et l'assigner en quelque sorte à résidence . Il est vrai que le pape , depuis longtemps , ne porte plus de tiare et n'est plus éventé par les plumes d'autruches  ...Sa parole serait-elle de moindre valeur en Occident ?

Ce silence apparent est un indice du basculement de nos sociétés .  Dans ce "nouveau monde" qui se prépare et qui se cherche quels seront les nouveaux dieux ? Certains affirment qu'ils ne logeront  pas au Vatican . Probablement pas non plus à Fort Knox , Wall Street ou Francfort  !

Ils seront alors à reconstruire .

____________

(1) La parole (et le dévouement) de prêtres au contact de malades en Italie est plus audible que celle de la hiérarchie . Certains comportements sont tout à fait admirables .

jeudi 19 mars 2020

Le mystère Buzyn : des propos équivoques , en rupture avec l'unité nationale



Incompréhensibles ! Tels apparaissent les propos d'Agnès Buzyn dans Le Monde (1) au moment où le Président de la République et le Premier ministre appellent , à juste titre , à la mobilisation générale . Des médias évoquent une fatigue excessive , d'autres une responsabilité personnelle trop lourde à assumer . A n'y rien comprendre ... Une Commission d'enquête parlementaire - le moment venu - est probable afin de clarifier les propos tenus ...et leur portée .

Comment expliquer les étonnants propos tenus au Monde par l'ex-ministre ? avant son départ du ministère de la santé Mme Buzyn avait-t-elle des informations de première main ? Un proche , l'ancien Président de l'INSERM aurait-il eu prioritairement accès à des données médicales en raison de contacts professionnels noués avec les scientifiques de Wuhan (2) et alerté la ministre ?

A l'heure actuelle on ne peut que s'interroger en attendant que le "mystère Buzyn " s'éclaircisse et aussi souhaiter que , par delà les paroles , les fatigues ou les rancœurs , l'unité nationale s'affiche vraiment . 

___________

(1) Quotidien Le Monde du 17 Mars 2020

(2) Le laboratoire P4 de Wuhan (recherches virologiques) a été réalisé avec l'expertise de l'Inserm (cf.  Science/Santé mai-juin 2017 n° 36 p.44-45 .Article d' Hervé Raoul  "Le laboratoire P4 de Wuhan , une réussite ".




mercredi 18 mars 2020

Arabie Saoudite et choc pétrolier : l'arroseur arrosé




Pour les automobilistes la baisse du prix de l'essence est une bonne nouvelle . Dans quel contexte au juste a lieu ce choc pétrolier à rebours ?  Celui d'un bras de fer entre l'Arabie Saoudite et la Russie qui se refuse à limiter sa production . D'où le "coup de poker " de Riyad : inonder le marché en ouvrant les vannes pour préserver sa part . 

Mais le Royaume n'anticipait peut-être pas la situation présente dans laquelle, en raison du prix du baril à moins de 30 $ , les stocks s'accumulent du fait des achats spéculatifs . Dans ce scénario le prix du baril n'est pas près de remonter et les automobilistes s'en frottent les mains en remerciant Mohamed Ben Salmane .

Ce scénario compte cependant de vrais perdants : l'Arabie Saoudite en raison de sa dépendance au pétrole (cf. Aramco) et la Russie dont le budget 2020 est bâti sur l' hypothèse d'un baril à 55 $ . Autres perdants hélas : les pays émergents "oleo-dépendants" (Afrique et Amérique latine ) ...ainsi que les producteurs (américains) de pétrole de schiste qui , de ce fait, pollueront moins   . A quelque chose malheur est bon !  

lundi 16 mars 2020

Fin de la " Route du Soi "



Il  est probable que la crise actuelle sonne la fin du "chacun pour soi " . Elle montre la vanité et l'inanité des égoïsmes nationaux :  le désordre mondial qui a prévalu jusqu'à présent conduit à un salutaire " retour de bâton" : On se rend bien compte que la stratégie du "America first" de Donald Trump ne s'avère pas payante : les américains - adeptes des fonds de pension et de la sécurité qui va avec - en prennent désormais conscience et en tireront les conséquences .

Une coordination G7/G20 apparaît dès lors indispensable . Un plan économique d'intervention requiert une mobilisation au plan mondial. Et elle se prépare . Tout comme la mobilisation sanitaire en cours requiert une réaction coordonnée , la mobilisation économique ne suppose pas un repli derrière les "lignes bleues " des frontières nationales . 

Emmanuel Macron a sonné la mobilisation européenne en même temps que l'appel au civisme dans les comportements au nom de la préservation de nos vies . En parallèle la caisse de résonance devra être mondiale : au-delà des voeux pieux c'est un objectif de survie qui est en jeu . La stratégie du rapport de force à l'américaine et de la "Route du Soi "(1) , on vient de le constater , conduisait "droit dans le mur ".
__________

(1) Exemple du "chacun pour soi" :  la récente tentative de la Maison Blanche pour faire main basse sur les chercheurs d'un laboratoire allemand travaillant à l'élaboration d'un vaccin (article de Die Welt du 15 mars repris par franceinfo + AFP )